CE N° 297931 Commune d’Annecy Application de la loi Constitutionnelle n° 2005-205

1° demande l’annulation du du décret n° 2006-993 du 1er Août 2006 relatif aux lacs de montagne pris pour application de l’article L 145-1 du code de l’urbanisme.

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE D’ANNECY est fondée à demander l’annulation du décret

D E C I D E :
————–

Article 1er : Le décret du 1er août 2006 est annulé.
Article 2 : L’Etat versera à la COMMUNE D’ANNECY une somme de 3 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE D’ANNECY, au Premier ministre et au ministre d’Etat, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire.

Note : En 1917 dans ses conclusions sur l’arrêt Baldy le commissaire du gouvernement Corneille affirmait que” la déclaration des droits de l’homme est, implicitement ou explicitement au frontispice des constitutions républicaines ” Aujourd’hui, vous pouvez complerter la la formule en ajoutant à ce frontispice la Charte de l’environnement .


CE 154900 Accroissement de puissance par accroissement du débit dérivé , préfet abus d’autorité

Sur la requête n° 158111 :
Considérant que les décisions attaquées des 4 et 30 juillet 1991 par lesquelles le préfet de la Haute-Loire a refusé d’autoriser la construction d’un barrage aux dimensions sollicitées par la SARL SOFFIM, sont fondées sur le refus opposé par l’arrêté du 12 février 1991 à sa demande d’autorisation de construire une usine hydroélectrique d’une puissance de 494 kw ; que l’arrêté du 12 février 1991 devant, ainsi qu’il a été dit plus haut, être annulé, il y a lieu d’annuler par voie de conséquence les décisions de refus opposées à la demande tendant à la reconstruction dudit barrage ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la SARL SOFFIM est fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de ClermontFerrand a rejeté sa demande dirigée contre les décisions du préfet de la Haute-Loire des 4 et 30 juillet 1991 ;
Sur les conclusions de la SARL SOFFIM tendant à l’application des dispositions de l’article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de l’article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner l’Etat à payer à la SARL SOFFIM une somme de 15 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Les jugements du tribunal administratif de Clermont-Ferrand en date du2 novembre 1993 et du 8 février 1994 et les décisions du préfet de la Haute-Loire en date du 12 février 1991, 4 juillet 1991 et 30 juillet 1991 sont annulés.
Article 2 : L’Etat est condamné à payer la somme de 15 000 F à la SARL SOFFIM, au titre de l’article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SARL SOFFIM et au ministre de l’aménagement du territoire et de l’environnement.

Le Conseil d’Etat N° 421149 s’auto-absout de tout péché en matière d’encadrement de la liberté de parole de ses ouailles par Éric Landot

Le Conseil d’Etat valide la décision de son Vice-Président qui rappelons le exerce la vraie présidence de la Haute Assemblée) encadrant, via la charte de déontologie de la juridiction administrative, la liberté d’expression des juges administratifs, notamment sur les réseaux sociaux. Car on n’est jamais bien servi que par soi-même.

Ce qui relève un problème général, d’une part (I)… car cette auto-absolution, ou presque auto-absolution, révèle une faiblesse de la procédure contentieuse administrative qui conduit à ce que le Conseil d’Etat soit le juge des actes de sa tête, ce qui est un piège, y compris et surtout pour le Conseil d’Etat lui-même.  

D’autre part, cet arrêt éclaire d’un jour cru mais que l’on peut comprendre les restrictions quant aux libertés de parole de ces magistrats. En effet, cette décision porte en elle une certaine image de la liberté de parole des magistrats et de ce que sont les réseaux sociaux, supposés publics par défaut et supposés, mais à mi-mots, polémiques (II).

CE Arrêt Ulrich du Conseil d’État du 28 juillet 1866

10.2.2 Texte de la décision du Conseil d’État
COURS D’EAU NON NAVIGABLES. — D OMMAGES AUX USINES . — C ONSISTANCE LÉGALE
DE L ’ USINE . — T RAVAUX EXTÉRIEURS NON AUTORISÉS ET CONSTITUANT UN MEILLEUR EM –
PLOI MAIS NON UNE AUGMENTATION DE LA FORCE MOTRICE . — I NDEMNITÉ DE DÉPRÉCIA –
TION . A MÉLIORATIONS POSSIBLES DANS LE MÉCANISME DE L ’ USINE .
Lorsqu’une usine existait antérieurement à 1790, — d’où la conséquence que son établisse-
ment est légal et que son propriétaire se trouve dans les conditions exigées par l’art. 48 delà
loi du 16 septembre 1807 pour obtenir indemnité en cas de chômage causé par des travaux
publics; — que depuis 1790 il n’a rien été changé aux ouvrages régulateurs de la retenue
de l’usine, ni au régime des eaux de la rivière; — mais que, sans accroître la force motrice
dont il pouvait légalement disposer, le propriétaire l’a mieux utilisée au moyen d’additions et
de perfectionnements apportés sans autorisation administrative aux vannes motrices, aux
coursiers et aux roues hydrauliques — doit-on, dans le règlement de l’indemnité, considé-
rer les vannes motrices, les coursiers et les roues hydrauliques comme existant légalement
dans l’état où ils se trouvent au moment du chômage pour travaux publics? — Rés. aff. —
1 re esp.
En est-il ainsi, alors même que, pour mieux utiliser la force motrice, le propriétaire a, sans
autorisation administrative, augmenté le nombre des tournants? — Rés. aff. — 2 e esp.
— (Il est reconnu par le ministre des travaux publics, qu’aucune disposition de loi ou de
règlement n’oblige les usiniers à se pourvoir d’une autorisation, soit pour modifier les vannes
motrices, coursiers et roues hydrauliques, soit même pour augmenter le nombre des roues
de leurs usines.)(1)
— Un propriétaire d’usine auquel est accordée une indemnité de dépréciation pour dimi-
nution de force motrice causée par des travaux publics, est-il fondé à demander qu’il lui
soit tenu compte de l’accroissement de force motrice qu’il aurait pu obtenir ultérieurement
86/100
au moyen d’améliorations à introduire dans le mécanisme de son usine? — Rés. nég. —
(Lorsque tout ou partie de la force motrice d’une usine lui est enlevée par suite de l’exécu-
tion d’un travail public, l’indemnité due au propriétaire doit être calculée d’après le préjudice
qu’il éprouve par la privation de la force motrice dont il faisait usage.) 1 re et 3 e esp. (2).
1 re ESP. (36,644.-28 juillet. Ulrich (Philippe).-MM. Aubernon, rap.- Aucoc, c. du g.; Michaux-
Bellaire, av.)
V U LES REQUÊTES LES REQUÊTES… pour le sieur Philippe Ulrich, propriètaire de l’usine
de Weyersheim, sur la rivière la Zorn… tendant à ce qu’il nous plaise réformer — un arrêté,
du 31 mai 1864, par lequel le cons. de pref. du Bas-Rhin a condamné l’État à lui payer : 1°
une indemnité de 14,844 fr. 79 c. à raison des chômages éprouvés par son usine depuis
le 1 er janv. 1853 jusqu’au 31 déc. 1861; — 2°une indemnité de 32,988 fr. 40 c. à raison
des chômages qu’elle a éprouvés depuis le 31 déc. 1861, et qu’elle éprouvera dans l’avenir,
par suite des prises d’eau établies dans la rivière la Zorn pour l’alimentation du canal de la
Marne au Rhin; — Ce faisant, attendu que ces indemnités seraient insuffisantes, les élever,
la première à la somme de 40,000 francs, et la seconde à la somme de 80,000 francs et
condamner l’Etat aux dépens;
Vu les observ. du Min. des trav. pub. tendant à ce qu’il nous plaise rejeter le pourvoi, attendu
que l’arrêté attaqué aurait fait une juste appréciation des dommages éprouvés par l’usine et
de ceux qu’elle éprouvera dans l’avenir par suite des prises d’eau du canal de la Marne au
Rhin;
Vu les lois du 28 pluv. an 8 et du 10 sept. 1807;
EN CE QUI TOUCHE la consistance légale de l’usine de Wegersheim : — Considérant
qu’il résulte de l’instruction que cette usine existait antérieurement à 1790; que, dès lors,
son établissement est légal et qu’ainsi le sieur Ulrich se trouve dans les conditions exigées
par l’art. 48 de la loi du 16 sept. 1807, pour que les propriétaires d’usine aient droit à une
indemnité; ,
Cons. que, depuis 1790, il n’a rien été changé aux ouvrages régulateurs de la retenue de la-
dite usine, ni au régime des eaux de la rivière la Zorn, et que, sans accroître la force motrice
dont il pouvait légalement disposer, le sieur Ulrich n’a fait que la mieux utiliser au moyen
d’additions et de perfectionnements apportés aux vannes motrices, aux coursiers et aux
roues hydrauliques :”— qu’il est reconnu par notre Min. des trav. pub. qu’aucune disposition
de loi ou de règlement n’oblige les usiniers à se pourvoir d’une autorisation pour modifier les
ouvrages précités; — que, dès lors, c’est à tort que le cons. de préf. a refusé de considé-
rer les vannes motrices, les coursiers et les roues hydrauliques de l’usine de Wegersheim
comme existant légalement dans l’état où ils se trouvaient au moment de l’établissement du
canal de la Marne au Rhin;
En ce qui touche l’indemnité afférente aux chômages éprouvés par l’usine jusqu’au 31 déc.
1861 : — Cons. qu’il résulte de l’instruction qu’il sera fait une juste appréciation du préjudice
que ces chômages ont causé au sieur Ulrich, en fixant l’indemnité qui lui est due à la somme
de 30,333 fr. 24 c, laquelle portera intérêt à son profit, pour 27,140 fr. 66 c. à partir du 16
août 1861, et pour le surplus à partir du 31 déc. 1861;
En ce qui touche l’indemnité de dépréciation évaluée en capital : — Cons. que, lorsque tout
ou partie de la force motrice d’une usine lui est enlevée, par suite de l’exécution d’un tra-
vail public, l’indemnité qui est due au propriétaire de ladite usine doit être calculée d’après le
préjudice qu’il éprouve par la privatiou de la force motrice dont il faisait usage : que, dès lors,
le sieur Philippe Ulrich n’est pas fondé à demander qu’il lui soit tenu compte de l’accrois-
87/100
sement de force motrice qu’il aurait pu obtenir ultérieurement, au moyen d’améliorations à
introduire dans les mécanismes de son usine;
Cons. qu’il résulte de l’instruction qu’il sera fait une juste appréciation, du préjudice que
causeront à l’avenir au sieur Ulrich les prises d’eau du canal de la Marne au Rhin, eu égard
à l’état actuel de la navigation, en fixant l’indemnité de dépréciation qui lui est due, à la
somme de 55,195 fr. 40 c, laquelle portera intérêt à son profit à partir du 31 déc. 1861.
Art. 1 er . L’Etat est condamné à payer au sieur Philippe Ulrich : — 1°à raison des chômages
éprouvés par l’usine de Wegersheim jusqu’au 31 déc. 1861, une indemnité de 30,533 fr. 24
c, laquelle portera intérêt à son profit, pour 27,140 fr. 66 c, à partir du 16 août 1861 et pour
le surplus à partir du 31 déc. 1861; — 2°à raison des chômages que l’usine a éprouvés
depuis le 31 déc. 1861, et de ceux qu’elle éprouvera à l’avenir, eu égard à l’état actuel de
la navigation dans le canal de la Marne au Rhin, une indemnité de dépréciation de 53,193
fr. 40 c. laquelle portera intérêt à partir du 31 déci 1861… (Arrêté réformé en ce qu’il a de
contraire. Rejet du surplus des conclusions du demandeur. Etat condamne aux dépens.)
Même date, arrêt semblable, n°36,691 [Chrétien Ulrich).
10.2.3 Conclusions du rapporteur public
(1 et 2) V. 5 juillet 1855 (p. 496, Beaufrère). Cet arrêt, dont on va trouver le sens dans les
observations du commissaire du gouvernement, a été le point de départ d’une jurisprudence
que viennent compléter les arrêts actuels, jurisprudence qui nous paraît reposer tout à la fois
sur un sentiment d’équité envers les propriétaires d’usine et sur une véritable intelligence
des intérêts de l’Etat. — Pour l’Etat, auquel profile de mille manières l’augmentation de la
richesse publique, le bon emploi des forces motrices est un intérêt de premier ordre, et pour
que les propriétaires d’usines ne reculent pas devant les dépenses sans lesquelles ils ne
peuvent tenir leurs établissements au niveau des perfectionnements industriels, il faut qu’ils
puissent compter sur une équitable réparation des dommages causés à ces établissements
par les travaux publics.
Voici les observations présentées sur ces importantes affaires par M. le commissaire du
gouvernement Aucoc
1
:
Le sieur Ulrich (Chrétien) demande une double indemnité à raison du préjudice
que lui font subir les prises d’eau effectuées par l’Etat dans la Zorn pour l’ali-
mentation du canal de la Marne au Rhin : — indemnité pour les chômages tem-
poraires causés à son usine; — indemnité pour la dépréciation que subira celle
même usine par suite du retour annuel et certain des mêmes chômages.
Avant d’entrer dans le détail des questions de fait que soulève cette affaire nous
devons examiner deux questions de droit qui la dominent.
La première est la question de savoir s’il doit être tenu compte à l’usinier de
la totalité de la force motrice dont il jouissait au moment où les prises d’eau
effectuées par l’Etat sont venues la réduire.
L’usine du sieur Ulrich, située sur la Zorn, rivière qui n’est ni navigable, ni flot-
table, a une origine bien antérieure à 1790; elle a une existence légale incontes-
tée. Mais la force motrice actuelle de l’usine est supérieure à celle dont l’usinier

  1. précautions de lecture : les conclusions sont ici reprises dans leur intégralité pour bien faire ressortir le
    raisonnement du rapporteur en matière de différenciation entre puissance disponible et puissance brute, cela
    ne préjuge en rien de la validité de toutes les affirmations avancées par ailleurs, au regard de l’état du droit de
    l’eau et de l’environnement en 2017.
    88/100
    jouissait en 1790. Ce n’est pas que le volume ni la hauteur de la chute d’eau
    aient été augmentés. Mais la position et la largeur des roues ont été modifiées.
    La vanne motrice est inclinée au lieu d’être verticale; il s’en suit que les roues
    rendent 27 p. 100 au lieu de 15 p. 100. Les changements apportés à la situation
    des roues et de la vanne motrice ayant été opérés sans autorisation de l’admi-
    nistration, le conseil de préfecture a décidé qu’il ne devait pas être tenu compte
    du supplément de force motrice qui résultait de ces changements irréguliers.
    Nous ne dissimulerons pas que cette décision du conseil de préfecture est
    conforme à plusieurs de vos décisions.
    Mais nous vous demandons la permission d’examiner si celle jurisprudence est
    conforme aux principes. Cette liberté, que vous n’avez jamais refusée à nos pré-
    décesseurs, est surtout nécessaire lorsqu’il s’agit de la matière des cours d’eau,
    matière où la jurisprudence a dû si souvent suppléer aux nombreuses lacunes
    de la législation; et les progrès considérables que vous avez faits depuis quinze
    ans dans la voie de l’équité nous imposent la confiance que vous ne refuserez
    pas de faire un nouveau progrès dans le même sens.
    Vous n’avez pas oublié qu’il y a quinze ans, l’administration des travaux publics
    soutenait d’une manière radicale que, dans le cas où elle privait une usine avant
    une existence légale d’une partie de sa force motrice, elle ne devait indemniser
    l’usinier qu’en raison de la valeur de l’usine, telle qu’elle était au moment de sa
    constitution légale, par exemple en 1790 pour les usines situées sur les cours
    d’eau non navigables, et non en raison de la valeur de l’usine au moment où le
    dommage était causé. Elle prétendait ne tenir aucun compte des modifications
    introduits postérieurement sans autorisation, soit dans les ouvrages intérieurs,
    soit dans les ouvrages extérieurs.
    Vous avez fait une première distinction. Vous avez reconnu, en 1851, que si l’usi-
    nier, par la transformation intérieure de l’usine, par l’affectation de son moteur à
    une industrie plus lucrative que l’industrie exercée en 1790, par la simplification
    et l’amélioration du mécanisme intérieur avait augmenté la valeur de son usine,
    il avait droit à être indemnisé en raison de la valeur qu’il avait créée par’ ces
    transformations, sans qu’il y eut à rechercher s’il avait été autorisé à les faire. Il
    vous a paru évident qu’un usinier n’avait pas besoin d’autorisation pour modifier
    les ouvrages intérieurs de son usine qui ne peuvent avoir aucune influence sur
    le cours de l’eau.
    Mais en même temps, vous décidiez qu’il en était autrement lorsque l’usinier avait
    augmenté la valeur de son usine par des changements apportés sans autorisa-
    tion aux ouvrages extérieurs. Et ici vous ne distinguiez pas entre la surélévation
    du barrage qui créait la chute d’eau et la modification des roues qui sont mises en
    mouvement par la chute d’eau. Tout changement aux ouvrages extérieurs vous
    paraissait irrégulier, s’il n’avait pas été autorisé. » Cette jurisprudence, établie
    par d’assez nombreuses décisions, n’est-elle pas trop absolue? nous croyons
    pouvoir l’établir.
    Dans la force motrice’que procurent à une usine ce quon appelle ses ouvrages
    extérieurs, il faut distinguer deux choses : la force motrice brute qui résulte du
    volume, de la hauteur et de la pente de la chute d’eau, et la force utile qui tient à
    l’état du mécanisme extérieur : roues, coursiers, etc. La force utile peut augmen-
    ter par un perfectionnement du mécanisme extérieur sans que la force brute ait
    été modifiée.
    Vous avez déjà reconnu l’exactitude de cette distinction dans deux affaires jugées
    89/100
    le 5 juillet 1855 (Beaufrère) et le 29 janvier 1857 (Flusin). A cette époque vous ad-
    mettiez que la clause des règlements d’usine qui dénie tout droit à indemnité en
    cas de privation totale ou partielle de la force motrice était valable pour les usines
    situées sur les cours d’eau non navigables. Et cependant vous n’admettiez pas
    qu’on pût l’opposer à l’usinier pour les modifications apportées aux coursiers, aux
    roues, et qui, sans augmenter la force motrice brute de l’usine, lui avaient permis
    de tirer un meilleur parti de la force qui se trouvait à sa disposition. Toutefois, il
    fallait, d’après ces deux décisions elles-mêmes, que ces modifications eussent
    été autorisées.
    Mais cette autorisation est-elle nécessaire pour toutes les modifications quel-
    conques apportées aux ouvrages extérieurs des usines? Y a-t-il une disposition
    de loi ou de règlement en vigueur qui la prescrive?
    Nous n’en connaissons pas. Les dispositions si fréquemment citées des lois des
    12-20 août 1790 et des 28 septembre-6 octobre 1791 ont chargé l’administration
    de veiller au libre cours des eaux, de diriger les eaux vers un but d’utilité générale
    d’après les principes de l’irrigation et de fixer la hauteur des barrages des usines
    à un niveau tel que la retenue d’eau ne nuise pas aux propriétés riveraines en
    les inondant.
    Il suit de là que nul ne peut établir ou modifier sans l’autorisation de l’administra-
    tion un ouvrage qui aurait une action sur le cours des eaux, qui en arrêterait le
    cours, qui en détournerait une certaine partie. Ainsi un barrage, une prise d’eau
    ne peuvent être établis sans autorisation.
    Mais quand une fois le barrage est autorisé, pourquoi l’administration aurait-elle à
    autoriser les ouvrages qui doivent utiliser la chute d’eau que procure le barrage?
    L’administration n’a pas à fixer la dimension ou la disposition des roues et du
    coursier, pas plus qu’elle n’a à décider que l’usine sera un moulin à farine ou une
    filature. Dans l’un comme dans l’autre cas, il né s’agit plus de créer une chute
    d’eau, il ne s’agit que de l’utiliser. L’usinier doit être libre de faire ce qu’il juge le
    plus avantageux, parce que sa décision ne peut en rien nuire à l’intérêt public
    confié aux soins de l’administration.
    C’est ce que l’administration des ponts et chaussées a reconnu depuis long-
    temps.
    En 1818, une commission d’inspecteurs généraux avait soumis au conseil géné-
    ral des ponts et chaussées, qui l’avait adopté, un projet d’instruction ministérielle
    résumant les traditions suivies en matière de règlement d’usine. Le projet n’a
    pas été converti, à cette époque, en instruction ministérielle; mais il a été auto-
    graphié et distribué aux ingénieurs; il a été reproduit par M. Tarbé de Vauclairs,
    dans son Dictionnaire des travaux publics; il servait de règle à l’administration.
    Or, nous trouvons dans l’art. 35 : « L’ingénieur ne doit pas s’immiscer dans le
    calcul des effets de l’usine projetée, n’étant pas appelé à donner son avis sur les
    qualités bonnes ou mauvaises de cette usine; il ne fixe pas les dimensions de la
    roue motrice, ni celle d’aucune partie du mécanisme ou de l’édifice destiné à le
    recevoir. »
    Ces traditions sont expressément consacrées par l’instruction ministérielle du 23
    octobre 1851 :
    Après avoir posé les règles à suivre pour déterminer le niveau légal de la rete-
    nue et pour l’établissement des ouvrages régulateurs, c’est-à-dire du déversoir
    de superficie et des vannes de décharge, le ministre arrive à ce qui concerne
    les vannes motrices, les coursiers et les roues hydrauliques, et voici comment il
    90/100
    s’exprime : « Sur les rivières non navigables ni flottables, hors les cas de partage
    d’eau dans lesquels l’administration peut être appelée à déterminer la situation
    respective des divers intéressés, les dimensions des roues motrices doivent être
    laissées à l’entière disposition des permissionnaires; il n’y a pas lieu non plus
    d’imposer l’établissement de vannes de prises d’eau en tête des dérivations, ni
    de fixer la largeur et la pente des canaux de dérivation, toutes les fois qu’il n’est
    pas reconnu nécessaire, dans » l’intérêt des propriétaires riverains ou par suite
    de quelque disposition locale, de régler l’introduction des eaux dans ces canaux.
    MM. les ingénieurs » n’ont, d’ailleurs, en aucun cas, à régler la chute de l’usine
    ni les dispositions du coursier et de la roue hydraulique. »
    Comment donc pourrait-on reprocher à un usinier d’être en faute, pour n’avoir pas
    demandé l’autorisation de modifier son coursier, sa roue, et même, dans certains
    cas, sa vanne motrice, puisque l’administration pose en règle qu’elle n’a pas à
    s’occuper de la disposition des coursiers et des roues et interdit à ses agents de
    les régler!
    L’administration ne peut avoir deux langages. Elle ne peut pas dire aux usiniers :
    modifiez vos coursiers, vos roues; tirez le parti le plus utile de la force motrice
    mise à votre disposition, je vous laisse complètement libres; et puis, quand vien-
    drait le jour de la liquidation d’une indemnité due à un usinier, changer de thèse
    et dire : Les modifications apportées à vos roues n’ont pas été autorisées, je n’en
    liens pas compte.
    M. le ministre des travaux publics doit donc renoncer à réclamer le bénéfice d’une
    jurisprudence fondée sur un motif dont nous avons démontré et dont il reconnaît
    lui-même l’inexactitude.
    Dans l’espèce, il est établi par les experts que l’usinier n’a pas élevé le niveau de
    la retenue telle qu’elle existait en -1790. Il s’est borné à utiliser la force motrice
    qui était à sa disposition, en modifiant la largeur et la position des roues et en
    inclinant la vanne motrice dont les dimensions n’intéressaient pas l’administra-
    tion, puisque l’usine occupe les deux rives d’un cours d’eau non navigable. Sa
    situation n’est donc pas irrégulière, et il doit lui être tenu compte de la totalité de
    la force motrice dont il dispose.
    Une seconde question de droit est soulevée par le sieur Ulrich. Selon lui les
    bases de l’indemnité ne peuvent pas être les mêmes pour les chômages tempo-
    raires et pour les dépréciations définitives de l’usine.
    Dans le premier cas, c’est la force motrice actuellement utilisée qui doit servir de
    base; mais dans le second cas, il doit être tenu compte à l’usinier de toute la
    force motrice que pouvait donner sa chute si son mécanisme extérieur avait reçu
    tous les perfectionnements possibles.
    Ici nous ne pouvons être d’accord avec le requérant. Nous reconnaissons bien
    qu’il n’avait pas besoin de permission pour faire à sa roue, à son coursier toutes
    les modifications nécessaires afin de les perfectionner.
    Mais c’est une faculté qu’il avait; ce n’est pas un droit acquis. En le privant d’une
    partie de l’eau dont il aurait pu mieux profiter, l’Etat lui enlève une espérance et
    non un bien réalisé. Où s’arrêterait-on, d’ailleurs, dans la voie des possibilités et
    des hypothèses?
    La valeur dont une partie a été enlevée au requérant, c’est la force motrice ac-
    tuelle, ou du moins la force motrice utilisée dans l’usine au moment où l’Etat a
    commencé les prises d’eau : la justice ne permet pas de prendre une autre base
    pour l’indemnité.
    91/100

CE Droits fondés en titres Augmentation de la Consistance légale (oui) Autorisation pour le surplus (oui) Libre disposition du terrain (non) CE du 14 juin 1999 n° 165341 et 168281

Considérant que, (l’article 29 de la loi du 16 octobre 1919) dispense les titulaires d’un droit fondé en titre d’avoir à demander une autorisation pour entreprendre les travaux destinés à améliorer le fonctionnement et les performances de leurs ouvrages – (….)

(toutefois) dès lors que lesdits travaux ont pour objet d’augmenter la force motrice dont ils peuvent disposer sur le fondement de leur droit fondé en titre ( les titulaires de droits sont tenus de solliciter une autorisation correspondant au surplus.

Cette décision constitue un rappel de la jurisprudence ULRICH (CE 28 juillet 1866 REC.P 885) aux termes de laquelle l’usinier n’a pas à solliciter d’autorisation si, sans modifier le volume d’eau dérivé ni la hauteur de chute , celui-ci se limite à un meilleur aménagement de ses ouvrages intérieurs ou extérieurs dans le but d’obtenir une meilleure utilisation, la puissance supplémentaire étant considérée comme entrant sans augmentation de puissance

CE Arrêt n°338159 Association des irrigants

3. Considérant que la directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l’eau, dont les dispositions ont été transposées par la loi du 21 avril 2004, désormais codifiées aux articles L. 211-1 et suivants du code de l’environnement, pose le principe d’une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau qui doit permettre en priorité de satisfaire les exigences de la santé, de la salubrité publique, de la sécurité civile et de l’alimentation en eau potable de la population mais également de satisfaire ou concilier, lors des différents usages, activités ou travaux, les exigences, d’une part, de la vie biologique du milieu récepteur, d’autre part, de la conservation et du libre écoulement des eaux ainsi que de la protection contre les inondations, enfin, de toutes les activités humaines légalement exercées ; qu’en application de l’article L. 212-1 du même code, chaque bassin ou groupement de bassins hydrographiques est doté d’un ou de plusieurs schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux qui fixe les orientations permettant de satisfaire à ce principe ainsi que les objectifs de qualité et de quantité des eaux

Résumé : 27-05-05 1) Lorsqu’un schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux détermine, pour la définition des orientations générales de la gestion de la ressource en eau et la fixation des dispositions en vue de maîtriser les prélèvements d’eau, un ensemble de points clés pour la gestion des eaux dans le bassin considéré, auxquels sont associées notamment des zones d’influence et des valeurs de référence, le juge de l’excès de pouvoir exerce un contrôle de cette détermination limité à l’erreur manifeste d’appréciation. 2) Lorsque des dérogations aux orientations générales du schéma directeur sont consenties pour la réalisation de projets d’intérêt général, le juge de l’excès de pouvoir exerce un contrôle normal sur la détermination des motifs d’intérêt général et sur les dérogations consenties.
54-07-02-03 Lorsque des dérogations aux orientations générales d’un schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) sont consenties pour la réalisation de projets d’intérêt général, le juge de l’excès de pouvoir exerce un contrôle normal sur la détermination des motifs d’intérêt général et sur les dérogations consenties.
54-07-02-04 Lorsqu’un le schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) détermine, pour la définition des orientations générales de la gestion de la ressource en eau et la fixation des dispositions en vue de maîtriser les prélèvements d’eau, un ensemble de points clés pour la gestion des eaux dans le bassin considéré, auxquels sont associées notamment des zones d’influence et des valeurs de référence, le juge de l’excès de pouvoir exerce un contrôle de cette détermination limité à l’erreur manifeste d’appréciation.

CE le juge administratif et le droit de l’environnement

Le juge administratif et le droit de l’environnement
 
La préoccupation croissante des pouvoirs publics pour la protection de
l’environnement a entraîné l’adoption d’un important corpus normatif, aux niveaux 

nationalet international, dont le juge administratif assure quotidiennement la mise en œuvre et l’interprétation. La jurisprudence administrative a ainsi permis de préciser la 

portée des grands principes et des principaux textes du « droit de l’environnement » (I). 
Cette exigence transversale de protection de l’environnement s’impose désormais à
l’administration dans de très nombreux domaines d’action, qu’il s’agisse de la lutte 

contre lapollution engendrée par les activités industrielles, de la protection de la 

faune et des milieux naturels, ou encore de l’aménagement du territoire dans toutes 

ses formes (transports,réseaux électriques, grands travaux…). Aussi le juge administratif est‐il conduit à trancher un nombre croissant de litiges, dans les domaines les plus 

divers, portant sur des décisions administratives ayant une incidence sur 

l’environnement (II). 
I. Le juge administratif a précisé la portée des principaux textes régissant la protection
de l’environnement
La protection de l’environnement trouve aujourd’hui sa place à tous les niveaux de la
« hiérarchie des normes ». Elle a fait l’objet d’une consécration constitutionnelle en

 2005,avec l’adoption de la Charte de l’environnement (1). Le juge administratif 

applique et interprète également de nombreuses autres sources du droit de 

l’environnement, qu’il s’agisse de textes internationaux et européens (2),

ou des textes législatifs et réglementaires rassemblés, depuis 2000, au sein du code 

de l’environnement (3). La Charte de l’environnement et son « mode d’emploi » 

par le juge administratif
Depuis la réforme constitutionnelle du 1 er  mars 2005 1  et l’adoption de la Charte de l’environnement, la protection de l’environnement a 

fait son entrée dans le « bloc de constitutionnalité » et se trouve ainsi consacrée 

au plus haut niveau de la hiérarchie des normes.

Si certains des principes que la Charte édicte étaient déjà en germe dans la
législation environnementale avant 2005, leur constitutionnalisation a eu des 

répercussions importantes sur la répartition des compétences entre le 

législateur et le pouvoir réglementaire dans ce domaine, ainsi que sur l’office 

du juge administratif lui‐même. 

Sa jurisprudence a permis de préciser la portée de ces nouveaux principes 

constitutionnels. 
Par sa décision d’Assemblée Commune d’Annecy (CE, 3 octobre 2010, n° 297931), le
Conseil d’Etat a reconnu que l’ensemble des droits et devoirs définis par cette Charte 

ont

une valeur constitutionnelle et s’imposent aux pouvoirs publics et aux 

autorités administratives dans leurs domaines de compétence respectifs. Il  par

 ailleurs apporté des précisions importantes sur les modalités d’application de 

certains de ses articles qui sont

régulièrement invoqués dans le cadre des litiges dont il est saisi. 
1  Loi constitutionnelle n° 2005‐205 du 1 er mars 2005 relative à la Charte de l’environnement. 
‐ Le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé,
garanti par l’article 1 er  de la Charte de l’environnement
Cet article proclame que « Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré
et respectueux de la santé ». 
Le Conseil d’Etat a jugé qu’il découle de ces dispositions qu’il appartient pouvoir
réglementaire de veiller au respect de ce principe lorsqu’il est appelé à préciser les modalités de mise en œuvre d’une loi définissant le cadre de la protection de la 

population contre les risques que l’environnement peut faire courir à la santé. 

Il incombe alors au juge administratif de vérifier si les mesures réglementaires prises

 pour l’application de la loi, dans la mesure où elles ne se borneraient pas à en tirer les

 conséquences nécessaires (dans le cas contraire, seule la loi elle‐même, 

et non la mesure réglementaire d’application, peut alors utilement être contestée : 

cf. infra), n’ont pas elles‐mêmes méconnu ce principe. 
Il a par exemple exercé ce contrôle sur les dispositions réglementaires définissant les
mesures à prendre pour protéger la population contre les risques liés à la présence de
poussière d’amiante dans l’air à l’intérieur d’immeubles (CE, 26 février 2014, 

Association Ban Asbestos France et autres, n° 351514). 
‐ Le « principe de prévention » garanti par l’article 3 de la Charte de l’environnement
Cet article dispose que « toute personne doit, dans les conditions définies par la loi,
prévenir les atteintes qu’elle est susceptible de porter à l’environnement ou, à défaut, 

en limiter les conséquences ». 
Le Conseil d’Etat s’est prononcé sur la portée de ces dispositions dans une décision
d’Assemblée Fédération nationale de la pêche en France (12 juillet 2013, n° 344522) 

qui apporte notamment des précisions sur la répartition des compétences entre loi 

et règlement ainsi que sur les limites du contrôle du juge administratif dans ce 

domaine. Il a ainsi indiqué
qu’il incombe au législateur et, dans le cadre défini par la loi, au pouvoir réglementaire 

et aux autres autorités administratives, de déterminer les modalités de mise en 

œuvre de ces dispositions constitutionnelles. 
 En vertu de l’article 34 de la Constitution et de l’article 3 de la Charte, il appartient au
législateur de déterminer les principes fondamentaux de la préservation de
l’environnement et de définir le cadre de la prévention et de la limitation des
conséquences des atteintes à l’environnement. La conformité de telles dispositions
législatives à l’article 3 de la Charte ne peut être contrôlée que par le juge
constitutionnel. Le juge administratif n’en connaît pas en‐dehors de la procédure de la
question prioritaire de constitutionnalité prévue à l’article 61‐1 de la Constitution. 
 Le pouvoir réglementaire est, quant à lui, compétent pour mettre en œuvre les
principes définis par la loi. Il n’appartient alors au juge administratif de contrôler la
conformité des dispositions réglementaires d’application à l’article 3 de la Charte que
dans la mesure où elles ne se borneraient pas à tirer les conséquences nécessaires de

 la
loi. Lorsque le pouvoir réglementaire s’en tient à appliquer les dispositions législatives,
celles‐ci font « écran » au contrôle de constitutionnalité du juge administratif. 
‐ Le « principe de précaution » garanti par l’article 5 de la Charte de l’environnement
Cet article prévoit que « lorsque la réalisation d’un dommage, bien qu’incertaine en
l’état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et 

irréversible l’environnement, les autorités publiques veillent, par application du

 principe de précaution et dans leurs domaines d’attributions, à la mise en œuvre de 

procédures d’évaluation desrisques et à l’adoption de mesures provisoires et 

proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage ». 
A l’inverse des dispositions de l’article 3, celles de l’article 5 de la Charte n’appellent
pas de dispositions législatives et réglementaires précisant leurs modalités de mise en
œuvre. Elles s’appliquent donc directement aux pouvoirs publics et aux autorités
administratives dans leurs domaines de compétence respectifs, y compris en dehors 

du champ du droit de l’environnement (en matière d’urbanisme : CE, 19 juillet 

2010,
Association du quartier « Les Hauts de Choiseul », n° 328687). L’entrée en vigueur de la
Charte a ainsi conduit, sur ce point, à élargir le champ d’application du principe, qui 

figurait auparavant dans le code rural (art. L. 200‐1, issu de la loi n° 95‐101 du 2

février 1995 relative au renforcement de la protection de l’environnement) mais dont 

l’application était circonscrite aux décisions intervenant en matière environnementale

 (CE, 20 avril 2005,Société Bouygues Télécom, n° 248233).
Le Conseil d’Etat a fait application du principe de précaution à différents types
d’opérations et décisions de l’administration. Ce principe a notamment été invoqué en
matière de grandes opérations de travaux qui font l’objet d’une déclaration d’utilité
publique. Le Conseil d’Etat en a précisé les conditions d’application dans ce domaine

 par une
décision d’Assemblée du 12 avril 2013, qui portait sur la construction de deux lignes

 à très haute tension (Association coordination interrégionale Stop THT et autres, n° s  342409 et
a.). Il a ainsi jugé qu’il appartient à l’autorité saisie d’une demande tendant à ce qu’un

 projetsoit déclaré d’utilité publique de rechercher s’il existe des éléments

 circonstanciés de natureà accréditer l’hypothèse d’un risque de dommage grave 

et irréversible pour l’environnementou d’atteinte à l’environnement susceptible 

de nuire de manière grave à la santé, qui justifierait, en dépit des incertitudes 

subsistant quant à sa réalité et à sa portée en l’état des connaissances scientifiques,

 l’application du principe de précaution. Si tel est le cas,l’autorité administrative doit 

veiller à ce que des procédures d’évaluation du risque soient mises en œuvre. Elle doit

 alors vérifier que les mesures de précaution dont l’opération est assortie ne sont ni 

insuffisantes, ni excessives, eu égard, d’une part, à la plausibilité et à la
gravité du risque et, d’autre part, à l’intérêt de l’opération. 
‐ L’obligation de promouvoir un « développement durable », prévue par l’article 6 de
la Charte de l’environnement.
En vertu de cet article de la Charte, « les politiques publiques doivent promouvoir un
développement durable. A cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur 

de l’environnement, le développement économique et le progrès social ». 
Le Conseil d’Etat a jugé que ce principe est en particulier invocable, là encore, pour
contester des opérations de travaux faisant l’objet d’une déclaration d’utilité publique.
Lorsque cet article est invoqué, le juge administratif en vérifie le respect à travers le 

contrôle dit « du bilan » qu’il exerce traditionnellement sur l’utilité publique du projet 

(notammentdepuis la décision de principe CE, Assemblée, 28 mai 1971, « Ville nouvelle Est », n° 78825).
 Autrement dit, pour apprécier si l’administration a respecté les dispositions de
l’article 6 de la Charte, il apprécie, dans le cadre de sa jurisprudence classique, si les
atteintes portées à l’environnement ne sont pas excessives eu égard aux bénéfices 

attendus du projet ainsi qu’aux précautions qui l’accompagnent (CE, 16 avril 2010, 

Association Alcaly et autres, n° s  320667 et a.). 
‐ Le « principe de participation du public » garanti par l’article 7 de la Charte de
l’environnement
Cet article dispose que « toute personne a le droit, dans les conditions et limites
définies par la loi, d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant 

une incidence sur l’environnement ». 
Le Conseil d’Etat a jugé qu’en application de ces dispositions, une procédure de

participation du public n’est obligatoire que pour les décisions ayant une incidence 

directe et significative sur l’environnement. Certaines décisions relevant du droit de 

l’environnement ne nécessitent donc pas une telle procédure. Il en va ainsi, par 

exemple, des arrêtéscomplémentaires que l’autorité administrative peut prendre 

pour compléter l’autorisation initiale d’exploiter une installation classée pour la 

protection de l’environnement (ICPE), qui
n’ont pas une incidence significative sur l’environnement (CE, 17 octobre 2013, 

Commune d’Illkirch‐Graffenstaden, n° 370481). 
Par ailleurs, comme pour les articles 1, 2 et 6 de la Charte (CE, 19 juin 2006,
Association eau et rivière de Bretagne, n° 282456) et son article 3 (CE, Ass., 12 juillet

 2013,
Fédération nationale de la pêche en France, n° 344522), un requérant ne peut invoquer
directement son article 7 lorsque des dispositions législatives en assurent la mise en 

œuvre (CE, 12 juin 2013, Fédération des entreprises du recyclage, n° 360702). Un 

requérant ne peut donc se prévaloir de l’article 7 de la Charte pour affirmer que le 

principe de participation aurait été méconnu dans la mesure où les dispositions de 

l’article L. 120‐1 du code de l’environnement ont été prises afin de préciser les 

conditions et les limites dans lesquelles le principe de participation du public est 

applicable aux décisions réglementaires de l’Etat et de ses établissements publics. 

Le juge administratif fait application des sources internationales et européennes du
droit de l’environnement.
Des textes de droit international et européen sont très souvent invoqués devant le
juge administratif dans le cadre de litiges environnementaux. Il lui appartient alors d’en
apprécier la portée et notamment leur « effet direct » en droit interne. 
Sans dresser ici une liste exhaustive de ces sources « supra‐nationales », de plus en
plus nombreuses, on pourra notamment citer la convention d’Aarhus du 25 juin 1998

 sur l’accès à l’information et la participation du public en matière d’environnement, 

entrée en vigueur en 2001, dont le Conseil d’Etat a jugé que certaines de ses 

stipulations sont d’effet direct (cf. par exemple CE, 6 juin 2007, Commune de Groslay 

et autre, n° 292942 et a.). 
De nombreux règlements et directives de l’Union européenne sont également
fréquemment invoqués devant lui. Il en va ainsi, par exemple, de la directive 92/43/CEE du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune 

et de la flore sauvages, dite directive « Habitats » (cf. par exemple : juge des référés du 

Conseil d’Etat, 9 mai 2006, Fédération transpyrénéenne des éleveurs de montagne et 

autres, n°292398). 

Le code de l’environnement
Le droit national de l’environnement a longtemps été constitué de nombreux textes
épars (diverses polices spéciales de l’environnement, loi n° 76‐629 du 10 juillet 1976 

relativeà la protection de la nature, dispositions du code rural, etc.). 
Depuis l’adoption du code de l’environnement en 2000, l’essentiel des dispositions
législatives et réglementaires relevant de cette matière est désormais rassemblé dans un corpus unique. Il s’agit ainsi de l’une des principales références du juge administratif

Le juge administratif et le « droit de l’environnement industriel »
Le juge administratif est fréquemment saisi de litiges le conduisant à mettre en
œuvre des règles, que l’on peut rassembler sous la désignation de « droit de
l’environnement industriel », qui régissent la création, le fonctionnement et la 

fermeture des installations susceptibles de porter atteinte à l’environnement. 

Les mesures prises par l’administration dans ce domaine relèvent de régimes dits de « police administrative

spéciale » qui ont pour objet de prévenir et sanctionner les atteintes à

l’environnement. Figurent notamment parmi ces régimes celui des « installations classées pour la protection de l’environnement » et celui des installations nucléaires. 
‐ Le juge administratif, garant du respect du droit des installations classées pour la
protection de l’environnement 
Le régime juridique des installations classées pour la protection de l’environnement
est fixé par les articles L. 511‐1 et suivants du code de l’environnement. Les intérêts 

qu’il protège sont très variés et entendus largement puisqu’en vertu de l’article 

L. 511‐1, il vise les« usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d’une manière générale, les 

installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent

 présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l’agriculture, soit pour la

 protection de la nature, de l’environnement et des paysages, soit pour l’utilisation rationnelle de l’énergie, soit 

pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du

 patrimoinearchéologique ». 
Ces installations sont soumises à un régime de contrôle administratif plus ou moins stric

Le juge administratif et la protection de la faune et des milieux naturels
De nombreux dispositifs de protection et de gestion des espèces ainsi que de
sauvegarde des milieux naturels ont été instaurés par le législateur et mis en 

application parle pouvoir réglementaire. Ils font l’objet d’un contentieux désormais

 abondant devant lejuge administratif dont on ne peut dresser qu’un panorama non

 exhaustif. 
‐ La protection des espèces
En vertu de l’article L. 411‐1 du code de l’environnement, les espèces animales non
domestiques et les espèces végétales non cultivées qui présentent un intérêt 

scientifique en particulier ou dont les nécessités de préservation du patrimoine 

naturel lecommandent,font l’objet de mesures de protection édictées par le 

pouvoir réglementaire.  
Le Conseil d’Etat est ainsi conduit à se prononcer sur la légalité de telles mesures, et
notamment sur celle des listes d’espèces protégées (cf. par exemple CE, 27 février 

1981,
Syndicat des naturalistes de France et autres, n° 18561 et a.). Il contrôle le caractère
proportionné de ces règles de protection des espèces qui ne peuvent légalement 

consisteren une interdiction générale et absolue de modifier le milieu où vivent les

 espèces protégéeset doivent au contraire être adaptées aux nécessités que la

protection de certaines espèces impose en certains lieux (CE, 13 juill. 2006, 

Fédération nationale des syndicats depropriétaires forestiers sylviculteurs, n° 281812). 
Il est également saisi de litiges portant sur les dérogations aux mesures de protection des espèces. Dans ce cadre, il s’assure qu’il n’existe pas d’autre solution satisfaisante

que la destruction d’une espèce, qu’une telle mesure ne nuit pas à son maintien 

dans un état de conservation favorable et qu’elle est justifiée par l’un des motifs 

d’intérêt général prévus parl’article L. 411‐2 du code de l’environnement (CE, 11 février 2015, Collectif des éleveurs de la région des Causses de la Lozère et 

leur environnement‐Cercle, n° 370599). Le Conseil d’Etat a
par exemple annulé la délibération d’un conseil municipal prescrivant la destruction

 de loups sans restriction (CE, 8 décembre 2000, Commune de Breil‐surRoya, n° 204756).
‐ La gestion des espèces animales
 
Le juge administratif connaît également du contentieux relatif aux activités de
chasse et de pêche. Il est en effet conduit à se prononcer sur la légalité des arrêtés

 fixant lesdates d’ouverture et de clôture de la chasse et de la pêche (CE, 23 décembre 2011),
Association France Nature Environnement et autres, n° 345350 et a. ; CE, Ass., 12

 juillet 2013, Fédération nationale de la pêche en France, n° 344522), sur les mesures

 d’agrément des associations communales et intercommunales de chasse ainsi que des associations de pêche et de pisciculture (CE, 20 février 1985, M. Z. , n° 20427 ;

 CE, Section, 25 avril 1975,
Association des propriétaires riverains du Bassin de la Nive, n° 90542) ou encore sur 

les mesures réglementant les droits de chasse et de pêche (CE, 14 sept. 1994,

 Communed’Escoutoux, n° 114910 ; CE, 30 sept. 1983, Fédération départementale des associationsagréées de pêche de l’Ain et autres, n° 31875
Il tranche également des litiges portant sur les mesures d’autorisation de destruction 

des espèces nuisibles. Le Conseil d’Etat est ainsi conduit à apprécier la légalité des 

arrêtés du ministre de l’écologie fixant, dans chaque département, les espèces 

classées parmi les nuisibles (CE, 30 juillet 2014, Association pour la protection 

des animaux sauvages et autres,n° 363266 et a.) tout comme des mesures de

 refus d’inscription de certaines espèces sur ces listes (CE, 16 juillet 2014, Fédération 

départementale des chasseurs de la Charente‐Maritimeet autres, n° 363446 et a.). 
‐ La protection des milieux naturels
Outre les mesures de protection et de gestion des espèces elles‐mêmes, le juge
administratif est conduit à connaître de celles qui sont destinées à protéger leurs

 milieux de vie et notamment de la détermination des espaces à protéger au titre des 

divers zonages à
vocation environnementale. Sans dresser une liste exhaustive des différents 

dispositifs de
protection de l’environnement, on donnera ici un aperçu des nombreux litiges à

 l’occasion desquels le juge administratif met en œuvre et précise la portée de ces

 zonages. 
Le Conseil d’Etat a par exemple précisé les modalités d’entrée en vigueur du nouveau 

régime
juridique des parcs nationaux, issu de la loi n° 2006‐436 du 14 avril 2006 (CE, Section, 23mars 2012, Commune de Hures‐la Prade, n° 337144) ainsi que leurs modalités d’articulations avec le schéma de gestion cynégétique (CE, 29 octobre 2013, Association Les amis 

de la radeet des calanques et autres, n° 360085 et a.). De même, il a été conduit à 

se

prononcer sur la portée de la charte d’un parc naturel régional (Sect., 8 février 2012, 

Union des industries de carrières et matériaux de construction de Rhône‐Alpes, n° 321219) et sur son articulation avec d’autres actes, tels que les documents 

d’urbanisme (CE, 29 avril 2009, Commune de Manzat, n° 293896) ou le schéma

 départemental des carrières (CE, 25 juin 2014, Union nationale des industries de 

carrières et des matériaux de construction, n° 366007). 
Dans la même logique, le juge administratif est saisi de litiges portant sur les réserves
naturelles (cf. par exemple CE, 23 juin 2004, Association « Les amis de la Berarde et du HautVernon, n° 208297), sur la trame verte et bleue adoptée en application de l’article L. 371‐1du code de l’environnement (CE, 30 juill. 2014, Fédération départementale des chasseurs du PasdeCalais), sur les zones classées, en application de l’article 

L. 414‐1 du code del’environnement, dans le réseau « Natura 2000 » (CE, 26 décembre 2012, Syndicat dessylviculteurs du suouest et autres, n° 340395 et a.) ou encore sur l’application desdispositifs de protection prévus par les lois de protection du littoral (cf. encadré) et de lamontagne.
Le Conseil d’État et la protection du littoral
Le Conseil d’État a fortement contribué à la protection du littoral. Présentation de 

certaines de ses décisions les plus emblématiques. 
Par un arrêt France nature environnement du 28 juillet 2000 (n° 204024), le Conseil d’État a sanctionné la carence de l’État pour l’absence de décret d’application fixant la

 liste des communes riveraines des estuaires. Il a enjoint à l’État, sous 

astreinte,d’édicter ce texte réglementaire dans un délai de 6 mois. La loi du 3 janvier 1986 dite « loi littoral » prévoit en effet que sont 

notamment considérées comme « communes littorales » celles qui « sont riveraines 

des estuaires et des deltas lorsqu’elles sont situées en aval de la limite de salure des eaux et participent aux équilibres économiques et écologiques littoraux ». Or, la loi renvoyait au pouvoir de la  loi dans ces
collectivités. Le Conseil d’État a jugé qu’en dépit des difficultés rencontrées par

 l’administration dans l’élaboration de ce décret, son abstention à le prendre s’était 

prolongée très largement audelà d’undélai raisonnable. Il a donc enjoint à l’État de 

prendre le décret nécessaire, ce qui fut fait effectivement. 
Le Conseil d’État a également donné toute sa portée à la loi en jugeant, par exemple,

 que la règled’inconstructibilité dans la bande des 100 mètres à compter du rivage 

s’applique tant aux nouvelles constructions qu’à l’extension des constructions 

existantes (CE, 21 mai 2008, Min. des transports c/
Association pour le libre accès aux plages et la défense du littoral, n° 297744).
De même, le juge administratif s’assure, pour les dérogations à cette règle 

d’inconstructibilité, de laréalité des « activités exigeant la proximité immédiate de l’eau ». Il en a retenu une définitionrestrictive, qui n’inclut pas les activités touristiques, annulant ainsi des autorisations de construire àproximité immédiate du rivage des centres de thalassothérapie, des établissements de restaurationou encore des hôtels (TA de Rennes, 11 octobre 1989, Sté pour l’étude et la protection de la natureen Bretagne ; CE, 23 juillet 1993, Commune de Plouguerneau, n° 127513). 
Enfin, le juge administratif a retenu une conception extensive de la notion « d’espaces
remarquables » (articles L. 146‐1 et suivants du code de l’urbanisme). Il a estimé que l’énumérationdes espaces considérés comme tels par le code (dunes, marais, espaces boisés…) n’était pas limitative, et qu’elle s’appliquait à tout le territoire d’une commune 

littorale. Les « espacesremarquables » devant être protégés de l’urbanisation au titrede la loi littoral peuvent ainsi valoir à plusieurs kilomètres du rivage (CE, 25 novembre 1998, Commune de Grimaud, n° 168029). 
Le Conseil d’Etat est également conduit à se prononcer sur la façon dont s’articulent

 ces différents dispositifs de protection de l’environnement.

 Ainsi a‐t‐il jugé, par exemple, qu’un projet de classement de réserve naturelle ne 

constitue pas un programme ou projetd’activités, de travaux, d’aménagement 

d’ouvrages ou d’installation au sens de l’article L.332‐2 du code de l’environnement  

résultant de la transposition de la directive 92/43 CEE du21 mai 1992 dite « Natura 2000 » (CE, 26 novembre 2010, Sté Groupe Pizzorno
Environnement et autres, n° 331078 et a.). 
Enfin, certains litiges portent sur les dispositifs normatifs visant à protéger plus
spécifiquement certains types de milieux, notamment l’air (cf. par exemple CE, 26 mars
2008, Association des amis de la Terre Paris, n° 300952 : litige relatif à un arrêté 

approuvant un plan de protection de l’atmosphère) et l’eau. Le juge administratif est 

notamment conduit à contrôler les autorisations d’installations hydroélectriques 

(cf. par exemple CE, 23décembre 2014, Sté hydroélectrique du Pont du Gouffre, n° 361514). La protection de l’environnement, une exigence prise en compte par le juge
administratif dans des contentieux très divers.
La juridiction administrative ne connaît pas seulement des contentieux portant sur
les actes réglementaires mettant en œuvre ces différents dispositifs de protection de
l’environnement. Elle est également conduite à contrôler que certains projets autorisés parl’administration ou certaines mesures qu’elle adopte n’y portent pas atteinte. 
Son contrôle des actes pris par l’administration en matière de dissémination des 

organismes génétiquement modifiés en fournit un exemple. 
Le Conseil d’État et les organismes génétiquement modifiés
Par une décision du 28 novembre 2011, le Conseil d’Etat a annulé l’arrêté du ministre de l’agricultur et de la pêche du 7 février 2008 interdisant la mise en culture des variétés 

de semences de maïs génétiquement modifié Zea Mays L. lignée MON 810. Avant de 

statuer sur cette affaire, le Conseild’Etat avait saisi, à la demande des requérants, la 

Cour de justice de l’Union européenne afin qu’ellestatue sur plusieurs questions d’interprétation des directives et règlements de l’Union européenne applicables en la matière (CJUE, 8 septembre 2011, Monsanto SAS et a., C‐58/10 à C‐68/10). 
Appliquant les principes énoncés par cette décision de la Cour de justice de l’Union européenne, leConseil d’Etat a jugé que dès lors que le maïs MON 810 avait été autorisé 

en tant que semence à desfins de culture et notifié en tant que produit existant, il ne pouvait, au stade de la demande de renouvellement de son autorisation, faire l’objet 

d’une mesure de suspension et d’interdiction que dans le cadre d’une procédure

spécifique d’urgence et à condition que soit établi un risque important
mettant en péril de façon manifeste la santé humaine, la santé animale ou

 l’environnement. Enl’espèce, le ministre justifiait la mesure d’interdiction par un avis du comité de préfiguration de lahaute autorisé sur les OGM dressant une liste de questions méritant, selon lui, d’être étudiées et sebornant à faire état « d’interrogations quant aux conséquences environnementales, sanitaires et économiques possibles de la culture et de la commercialisation du MON 810 ». 

Le Conseil d’Etat ajugé que, dans ces conditions, les conditions d’interdiction de ces variétés de semence n’étaientpasremplies (CE, 28 novembre 2011, Sté Monsanto SAS et autres, n° 313605 et a.). Une nouvelle décisiona été prise dans le même sens à 

propos d’un nouvel arrêté d’interdiction des mêmes semences du 16mars 2012 (CE, 

1 er  août 2013, Association générale des producteurs de maïs et a., n° 358103). 
Le Conseil d’Etat a également eu l’occasion de se prononcer sur les règles édictées par le Gouvernement français, encadrant la dissémination des OGM et la mise sur le 

marché de produitsalimentaires en comportant. Tirant les conséquences de l’entrée en vigueur des articles 3 et 7 de laCharte de l’environnement, il a partiellement annulé 

deux décrets du 19 mars 2007 au motif que lepouvoir réglementaire n’était pas compétent pour édicter les dispositions relatives d’une part, auxconditions et limites de l’information du public sur la dissémination des OGM, et, d’autre part, conditions de la 

prévention des atteintes susceptibles d’être portées à l’environnement (CE, 24 juillet
2009, Comité de recherche et d’information indépendante sur le génie génétique, n° 305314 et a.).
S’agissant de la répartition des compétences entre autorités publiques dans ce domaine, le Conseild’Etat a jugé que la police spéciale de la dissémination volontaire d’OGM avaient été confiée par lelégislateur à l’Etat et que le maire ne pouvait donc s’immiscer dans l’exercice de cette police spécialepar l’édiction d’une réglementation locale. Il a ainsi annulé un arrêté municipal interdisant pour troisans la culture de plantes 

génétiquement modifiées en plein champ dans certaines zones de la
commune (CE, 24 septembre 2012, Commune de Valence, n° 342990). 
Sa jurisprudence a également permis de préciser la portée de l’obligation  d

‘information du public surles lieux de dissémination des OGM. Par une décision du 21 novembre 2007 (Commune de Sausheim,n° 280969), le Conseil d’État a jugé que le lieu où la dissémination est pratiquée ne peut êtreconsidéré comme confidentiel pour la protection des intérêts des demandeurs de dissémination oudes intérêts protégés par la loi. Dès lors, l’autorité administrative qui détient des informationsrelatives à la localisation de la dissémination d’OGM est tenue de communiquer, sans délai et sans
condition, à toute personne qui en fait la demande, l’ensemble des données en sa

 possession. 
De nombreux projets d’aménagement autorisés par l’administration font également

l’objet d’un contrôle du juge administratif au regard d’exigences environnementales.

 C’estainsi qu’après une visite sur place, le Conseil d’État a annulé la déclaration d’utilité publiquede la ligne électrique à haute tension qui devait traverser le site du Verdon au motif « queles atteintes graves portées par le projet à ces zones d’intérêt exceptionnel excèdent l’intérêt
de l’opération et sont donc de nature à lui retirer son caractère d’utilité publique » (CE, 

10juillet 2006, Association interdépartementale et intercommunale pour la protection du lac deSte Croix, des lacs et sites du Verdon et autres, n° 288108). De même, la

 déclaration d’utilité publique du barrage de la Trézence (Charente‐Maritime) a été annulée compte tenu de son coût et des atteintes à l’environnement,

 notamment aux espèces aquatiques, qu’impliquaitce projet (CE, 22 octobre 2003, Association « SOS‐rivières et environnement » et autres, n°231953). 
Enfin, le principe de précaution est également susceptible d’être appliqué à de
domaines d’intervention de l’administration. C’est ainsi que le Conseil d’Etat a jugé que ceprincipe est invocable à l’encontre d’une décision d’implantation d’antennes relais de
téléphonie mobile, au motif que les champs radioélectriques émis seraient 

susceptibles deporter atteinte à la santé humaine (CE, 8 octobre 2012, Commune de Lunel, n° 342423), del’acte par lequel l’administration réglemente la navigation et les activités sportives ettouristiques sur un cours d’eau, un lac, une retenue ou un étang d’eau douce (CE, 3 juin2013, Association interdépartementale et intercommunale pour la

 protection du lac de
Sainte Croix, de son environnement, des lacs, sites et villages du Verdon, n° 334251) 

ou encore des dispositions réglementaires relatives à la protection de la population 

contre les risques liés à la présence de poussière d’amiante dans les immeubles

 (CE, 26 février 2014, Association Ban Asbestos France et autres, n° 351514). 
Pour aller plus loin : 
‐ Cycle de conférences du Conseil d’Etat : « Les enjeux juridiques de l’environnement »
(2012‐2013)
‐ Cycle de conférences du Conseil d’Etat : « La démocratie environnementale » (2011)
‐ Rapport public du Conseil d’Etat sur L’eau et son droit (2010)

CE n ° 425973 modification par Le décret n° 2018-575 prorogation de la validité des autorisations de défrichement

Résumé : 44 Le décret n° 2018-575 du 3 juillet 2018 attaqué se borne à porter de trois à cinq ans la durée maximale de la prorogation de la validité des autorisations de défrichement prononcée dans les conditions prévues à l’article D. 341-7-1 du code forestier et n’a ni pour objet ni pour effet de modifier la consistance des opérations de défrichement antérieurement autorisées, dont dépendent les incidences environnementales de ces opérations. Si les dispositions issues du décret sont susceptibles de permettre au titulaire d’une autorisation de défrichement se trouvant dans l’une ou l’autre des situations prévues à cet article de mettre en oeuvre l’autorisation au cours des neuvième et dixième années suivant sa délivrance, alors qu’en l’absence de ces dispositions, il aurait dû former une demande de délivrance d’une nouvelle autorisation sur laquelle il aurait été statué au regard des circonstances de droit et de fait prévalant à la date de la décision de l’administration, ce seul fait n’implique pas une violation du principe de non-régression en matière de protection de l’environnement.

CE modification zone humide n° 386325

D E C I D E :
————–
Article 1er : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Nancy du 9 octobre 2014 est annulé.
Article 2 : L’affaire est renvoyée à la cour administrative d’appel de Nancy.
Article 3 : L’Etat versera à M. B…la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A…B…et à la ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer.

Résumé : 27-05 Il ressort des dispositions de l’article L. 211-1 du code de l’environnement, éclairées par les travaux préparatoires de la loi sur l’eau du 3 janvier 1992 dont elles sont issues, qu’une zone humide ne peut être caractérisée, lorsque de la végétation y existe, que par la présence simultanée de sols habituellement inondés ou gorgés d’eau et, pendant au moins une partie de l’année, de plantes hygrophiles.,,,Cour ayant estimé, pour juger que le terrain d’assiette du plan d’eau litigieux était constitutif, dans sa totalité, d’une zone humide, que les études pédologiques menées par un bureau d’études avaient mis en évidence la présence de sols fortement et moyennement hydromorphes, et ayant regardé comme dépourvue d’incidence la présence, sur le terrain d’assiette du plan d’eau, de pins sylvestres, espèce dont il n’est pas contesté qu’elle ne présente pas un caractère hygrophile, tout en s’abstenant de rechercher si d’autres types de végétaux hygrophiles étaient présents sur ce terrain. Erreur de droit à avoir regardés comme alternatifs les deux critères d’une zone humide, au sens de l’article L. 211-1 du code de l’environnement, alors que, ces deux critères sont cumulatifs, contrairement d’ailleurs à ce que retient l’arrêté du 24 juin 2008 précisant les critères de définition des zones humides en application des articles L. 214-7-1 et R. 211-108 du code de l’environnement.

CE intérêt général n° 80804

l’intérêt général rejoint l’intérêt prive automobile Peugeot

QU’IL RÉSULTE DE TOUT CE QUI PRÉCÈDE QUE LA VILLE DE SOCHAUX N’EST PAS FONDÉE A DEMANDER L’ANNULATION DU JUGEMENT ATTAQUE PAR LEQUEL LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE BESANÇON A REJETTE SA DEMANDE DIRIGÉE CONTRE L’ARRÊTE MINISTÉRIEL DU 15 AVRIL 1969 :