Arrêt n°3054 du 28 janvier 2020 (19-80.091)- Cour de cassation – Chambre criminelle – ECLI:FR:CCASS:2020:CR03054

Cassation

Demandeur(s) : Fédération Départementale du Rhône et Métropole de Lyon pour la pêche et la protection du milieu aquatique

Défendeur(s) : Société Suez-Eau France ; et autres


Attendu qu’il ressort de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure qu’en juillet 2018 une pollution a été relevée dans le cours d’eau « La Brévenne », à hauteur de la station de traitement et d’épuration des Rossandes à Sainte Foy l’Argentière, dont l’exploitation a été confiée par le syndicat intercommunal des Rossandes (SIVU) à la société Suez Eau France ; qu’une enquête pénale a été diligentée, que les analyses effectuées ont fait apparaître des taux de concentration en nitrites, phosphates et ions ammonium supérieures aux normes réglementaires fixées par l’arrêté ministériel du 21 juillet 2015 relatif aux systèmes d’assainissement collectif et aux installations d’assainissement non collectif ; que, sur demande de la Fédération départementale du Rhône et de la métropole de Lyon pour la pêche et la protection du milieu aquatique (FDAAPPMA) le procureur de la République a saisi le juge des libertés et de la détention sur le fondement de l’article L. 216-13 du code de l’environnement d’une requête tendant à ce qu’il soit enjoint au SIVU et à la société Suez Eau France de cesser tout rejet dans le milieu aquatique dépassant les seuils fixés par l’arrêté du 21 juillet 2015 précité ; que par ordonnance du 5 septembre 2018, exécutoire par provision, le juge des libertés et de la détention a fait droit, sous astreinte, à la requête pour une durée de six mois, que la société Suez Eau France et le SIVU en ont interjeté appel, qu’à leur demande présentée en application du dernier alinéa de l’article L. 216-13 précité du code de l’environnement, le président de la chambre de l’instruction a, par ordonnance du 10 septembre 2018, suspendu l’exécution de la décision du juge des libertés et de la détention jusqu’à ce qu’il soit statué sur l’appel de celle-ci ; En cet état :

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l’homme, L. 216-13 du code de l’environnement et 191 du code de procédure pénale ;

“en ce que M. X…, président de la chambre de l’instruction qui a rendu l’ordonnance du 10 septembre 2018 ayant suspendu le caractère exécutoire par provision de l’ordonnance du juge des libertés et de la détention en date du 5 septembre 2018 qui a ordonné à la société Suez Eau France et au SIVU des Rossandes de cesser tout rejet dans le milieu aquatique dépassant les seuils fixés par l’arrêté du 21 juillet 2015, a présidé la chambre de l’instruction qui, par l’arrêt attaqué, a infirmé l’ordonnance ainsi rendue par le juge des libertés et de la détention ;

“alors que la chambre de l’instruction, appelée à statuer sur l’appel d’une ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant prononcé des mesures provisoires sur le fondement de l’alinéa 1 de l’article L. 216-13 du code de l’environnement, est irrégulièrement composée si elle est présidée par le magistrat qui, sur le fondement de l’alinéa 6 du même texte, a rendu l’ordonnance ayant suspendu l’ordonnance du juge des libertés et de la détention jusqu’à ce qu’il soit statué sur l’appel ; qu’en cet état, la composition de la chambre de l’instruction n’était pas régulière” ;

Attendu que le demandeur, qui n’a pas usé de la faculté, offerte par l’article 668 du code de procédure pénale, de demander la récusation du président de la chambre de l’instruction, n’est pas recevable à mettre en cause l’impartialité de ce magistrat à l’occasion d’un pourvoi en cassation ;

Mais sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 216-6 et L. 216-13 du code de l’environnement, 121-3 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

en ce que l’arrêt attaqué a infirmé l’ordonnance du juge des libertés et de la détention qui avait ordonné à la société Suez Eau France et au SIVU des Rossandes de cesser tout rejet dans le milieu aquatique dépassant les seuils fixés par l’arrêté du 21 juillet 2015 ;

“1°) alors que les mesures conservatoires que le juge des libertés et de la détention peut ordonner sur le fondement de l’article L. 216-13 du code de l’environnement s’adressent à toute personne concernée par la pollution des eaux sans qu’importe la question de savoir si la responsabilité pénale de cette personne peut être engagée à raison de cette pollution ; que, dès lors, en se fondant, pour infirmer l’ordonnance du juge des libertés et de la détention qui avait ordonné au SIVU des Rossandes et à la société Suez Eau France, respectivement propriétaire et exploitante de la station d’épuration des Rossandes, de cesser tout rejet dans le milieu aquatique dépassant les seuils fixés par l’arrêté du 21 juillet 2015, sur la circonstance qu’il n’était pas établi que ces personnes morales puissent se voir imputer la responsabilité pénale des rejets non conformes, la chambre de l’instruction a méconnu les textes et le principe ci-dessus mentionnés ;

“2°) alors en tout état de cause que le délit de pollution des eaux prévu et réprimé par l’article L. 216-6 du code de l’environnement est constitué s’il est établi que l’auteur des faits n’a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait ; qu’en retenant, pour infirmer l’ordonnance du juge des libertés et de la détention, que la seule constatation des anomalies relevées quant aux concentrations réglementaires dans le cours d’eau « La Brévenne » , à hauteur de la station de traitement et d’épuration des Rossandes, ne pouvait suffire à caractériser une faute de nature à engager la responsabilité pénale de la SAS Suez Eau France et/ou du SIVU des Rossandes sans rechercher, ainsi qu’elle y était invitée par le mémoire de la FDAAPPMA, si cette société et ce SIVU avaient, en leur qualité respective d’exploitante et de propriétaire de la station d’épuration, installation classée pour la protection de l’environnement, accompli les diligences normales compte tenu de la nature de leurs missions ou de leurs fonctions, de leurs compétences et des moyens dont ils disposaient, la chambre de l’instruction n’a pas justifié sa décision” ;

Vu l’article L. 216-13 du code de l’environnement ;

Attendu que l’alinéa premier de cet article donne compétence au juge des libertés et de la détention, à la requête du procureur de la République, dans le cadre d’une enquête pénale diligentée pour non-respect des prescriptions imposées au titre des articles L. 181-12, L. 211-2, L. 211-3 et L. 214-1 à L. 214-6 du code de l’environnement, pour ordonner aux personnes concernées toute mesure utile, y compris la suspension ou l’interdiction des opérations menées en infraction à la loi pénale ;

Attendu que, pour infirmer l’ordonnance du juge des libertés et de la détention, l’arrêt relève qu’il se déduit de l’insertion de l’article L. 216-13 du code de l’environnement dans la sous-section 2 intitulée « sanctions pénales » de la section 2 intitulée « dispositions pénales » du chapitre VI, lequel regroupe les dispositions relatives aux « contrôles et sanctions » du titre du code de l’environnement relatif à l’eau et aux milieux aquatiques et marins que l’intervention du juge des libertés et de la détention est nécessairement subordonnée au constat de l’une des infractions de la sous-section concernée ; que les juges ajoutent que l’enquête de gendarmerie n’est pas de nature à répondre à ces exigences, qu’en effet la seule constatation des anomalies relevées quant aux concentrations réglementaires dans le cours d’eau « La Brévenne » , à hauteur de la station de traitement et d’épuration des Rossandes, ne saurait suffire à caractériser au sens des articles susvisés une faute de nature à engager, à la charge de la société Suez Eau France et/ou du SIVU, leur responsabilité pénale ou l’imputabilité contraventionnelle du non respect des prescriptions réglementaires, alors, de plus, que l’ensemble des parties s’accordent à imputer la responsabilité de la pollution à l’activité de la société Provol et Lachenal pour des déversements industriels dans le réseau d’assainissement ;

Mais attendu qu’en statuant ainsi, alors que l’article L. 216-13 du code de l’environnement ne subordonne pas à la caractérisation d’une faute de la personne concernée de nature à engager sa responsabilité pénale le prononcé par le juge des libertés et de la détention, lors d’une enquête pénale, de mesures conservatoires destinées à mettre un terme à une pollution ou à en limiter les effets dans un but de préservation de l’environnement et de sécurité sanitaire, la chambre de l’instruction a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt susvisé de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Lyon, en date du 9 novembre 2018,

Et pour qu’il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l’instruction de Grenoble, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 618-1 du code de procédure pénale 

Arrêt n° 618 du 19 juin 2015 (13-19.582) – Cour de cassation – Assemblée plénière – ECLI:FR:CCASS:2015:AP00618


cassation ; propriété

Irrecevabilité du premier moyen et rejet du second


Demandeur(s) : le syndicat intercommunal pour l’aménagement hydraulique (SIAH) des vallées du Croult et du Petit Rosne
Défendeur(s) : la Société anonyme du domaine immobilier de la Muette (SADIM)


Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 21 mars 2013),rendu sur renvoi après cassation (3e Civ. 5 mai 2010, pourvoi n° 09-66.131), que le syndicat intercommunal pour l’aménagement hydraulique des vallées du Croult et du Petit Rosne (SIAH), dans le cadre d’un programme de construction de bassins de retenue des eaux pluviales sur le cours des rivières gérées par lui, a régulièrement acquis par voie d’expropriation, une partie d’un terrain appartenant à la Société du domaine immobilier de la Muette (SADIM) ; qu’il a ensuite construit, sur une autre partie de ce terrain, non concernée par la procédure d’expropriation, un canal de dérivation des eaux de la rivière Petit Rosne ; que l’arrêt, constatant l’existence d’une voie de fait, a ordonné sous astreinte sa démolition, la remise en état des lieux et a condamné le SIAH à des dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen :

Attendu que, se fondant sur la motivation d’une décision du Tribunal des conflits rendue le 17 juin 2013 dans une autre instance, le SIAH fait grief à l’arrêt, d’une part, de ne pas constater que la construction du canal litigieux a abouti à l’extinction du droit de propriété de la SADIM et, d’autre part, de retenir que la construction de l’ouvrage public, effectuée sans titre sur une propriété privée, ne peut être rattachée à un pouvoir appartenant à l’autorité publique ;

Mais attendu que le moyen, qui reproche à la juridiction de renvoi d’avoir statué conformément à l’arrêt de cassation qui la saisissait, est irrecevable ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu qu’ayant relevé que le SIAH s’était borné à autoriser son président à lancer les enquêtes préalables à l’obtention d’une déclaration d’utilité publique, la cour d’appel, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par la seconde branche du moyen, a pu retenir que ces seules diligences étaient insuffisantes à caractériser l’engagement d’une procédure de régularisation appropriée ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

COUR DE CASSATION

Propriété / voie de fait / Tribunal des conflits (19.06.15)


Par une décision de principe du 17 juin 2013 (Bergoend c/ERDF, n°3911, Bull. 2013, T. Conflits, n° 11), le Tribunal des conflits a considérablement resserré la notion de voie de fait, déterminant la compétence de la juridiction judiciaire en matière d’atteintes irrégulièrement portées par l’autorité publique à la propriété privée. Seules les atteintes manifestement insusceptibles de se rattacher à un pouvoir appartenant à l’administration et aboutissant à l’extinction du droit de propriété relèvent à présent de cette compétence, le Tribunal des conflits ayant ajouté que l’implantation, même sans titre, d’un ouvrage public sur le terrain d’une personne privée ne procédait pas d’un acte insusceptible d’être rattaché à un pouvoir dont dispose l’administration . Cette nouvelle conception emporte abandon d’une jurisprudence constante , encore rappelée dans une décision Arriat c/ Commune de Nevers du 21 juin 2010 (n°3751, Bull. 2010, T. conflits, n° 14), qualifiant de voie de fait la construction sans titre d’un ouvrage d’assainissement sur un terrain privé.

Les chambres civiles concernées de la Cour de cassation, prenant acte de cet infléchissement, ont fait application des critères de la voie de fait, dans leur nouvelle définition, aux litiges portés devant elles, quand bien même l’arrêt de la cour d’appel qui leur était déféré était antérieur au revirement opéré par le Tribunal des conflits. Elles ont constaté que la juridiction judiciaire était devenue incompétente soit en raison du fait que les travaux réalisés par l’autorité publique n’avaient pas abouti à l’extinction de la propriété privée immobilière ( 1ère Civ. 13 mai 2014, n°12-28.248, Bull. 2014,I, n° 87), soit parce que l’occupation, même sans titre, d’un ouvrage public sur une propriété privée ne procédait pas d’un acte manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir dont disposait l’administration ( 1ère Civ.15 octobre 2014, n° 13-27.484, Bull. 2014, I, n°168 ; 3ème Civ. 11 mars 2015, n°13-24.133, en cours de publication).

Toutefois, le litige soumis à l’Assemblée plénière se présentait dans une configuration particulière.

Par un arrêt du 5 mai 2010 (n° 09-66.131, Bull.2010, III, n° 90), la troisième chambre civile de la Cour de cassation avait censuré l’arrêt de la cour d’appel qui, tout en constatant l’irrégularité de la construction sur un terrain privé d’un canal de dérivation des eaux pluviales par un syndicat intercommunal d’aménagement hydraulique, sans autorisation du propriétaire ni mise oeuvre d’une procédure d’expropriation, avait néanmoins estimé que l’emprise ainsi réalisée ne constituait pas une voie de fait.

La cour d’appel, statuant sur renvoi par un arrêt du 21 mars 2013, a retenu que l’implantation sans titre de cet ouvrage était manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir de l’administration, en a déduit l’existence d’une voie de fait, se conformant ainsi à la doctrine de l’arrêt de cassation, et a ordonné la démolition, après avoir relevé l’absence de régularisation opérée par le syndicat intercommunal.

Le demandeur au pourvoi, se fondant à l’évidence sur les nouveaux critères de la voie de fait dégagés, dans une instance distincte, par le Tribunal des conflits, postérieurement à l’arrêt attaqué, reprochait à la cour d’appel, d’une part, de ne pas avoir constaté l’absence d’extinction du droit de propriété privée provoquée par l’occupation du canal litigieux, et, d’autre part, d’avoir estimé que la construction d’un tel ouvrage public ne se rattachait pas à un pouvoir appartenant à l’administration.

L’Assemblée plénière devait ainsi s’interroger sur la recevabilité d’un moyen revenant à remettre en cause la motivation de la cour d’appel qui s’était conformée à la doctrine de l’arrêt de cassation qui l’avait saisie. Le revirement de jurisprudence opéré par le Tribunal des conflits, postérieurement à ces deux décisions, devait-il conduire à admettre la recevabilité d’un tel moyen ?

Il est de principe , notamment depuis un arrêt de la chambre mixte du 30 avril 1971 ( n°61-11.829, Bull. 1971, Ch. mixte n° 8), que “ la Cour de cassation ne peut être appelée à revenir sur la doctrine affirmée en son premier arrêt lorsque la juridiction de renvoi s’y est conformée… que n’est pas recevable le moyen par lequel il est seulement reproché à la cour de renvoi d’avoir statué en conformité de l’arrêt de cassation qui l’a saisie ”, cette règle, confirmée ultérieurement par un arrêt de l’Assemblée plénière du 9 juillet 1993 ( n°89- 19.211, Bull. 1993, Ass. Plén. n°13) étant actuellement appliquée par l’ensemble des formations de la Cour de cassation.

La question avait ensuite été posée à l’Assemblée plénière de la portée d’un revirement de jurisprudence opéré par cette même formation par rapport à la règle antérieurement énoncée, dans une autre instance, par un arrêt de cassation à la doctrine duquel s’est conformé la cour d’appel statuant sur renvoi : l’interposition de ce revirement opéré par la formation la plus solennelle de la Cour, abandonnant la solution adoptée par l’arrêt de cassation, avait -elle pour effet d’autoriser le demandeur au nouveau pourvoi, formé contre l’arrêt statuant sur renvoi, à remettre en discussion les dispositions de cette dernière décision conformes à l’arrêt de cassation ? L’Assemblée plénière a tranché cette question dans deux arrêts du 21 décembre 2006 (n° 05-11.966 et 05-17.690, Bull. 2006, Ass. Plén. n°14) : le moyen, qui reproche à la juridiction de renvoi d’avoir statué conformément à l’arrêt de cassation qui la saisissait, est irrecevable, peu important que postérieurement à l’arrêt qui saisit la juridiction de renvoi, l’Assemblée plénière de la Cour de cassation ait rendu, dans une autre instance, un arrêt revenant, fût-ce en application d ‘une décision de droit communautaire (n° 05-11.966), sur la solution exprimée par l’arrêt saisissant la juridiction de renvoi.

Ce principe, qui est réaffirmé par l’Assemblée plénière dans le présent arrêt, la conduit à déclarer irrecevable le premier moyen proposé pour le demandeur au pourvoi, en ce qu’il a fait grief à la juridiction de renvoi d’avoir statué en conformité avec l’arrêt de cassation, en se prévalant d’un revirement jurisprudentiel ultérieur du Tribunal des conflits, modifiant une règle de répartition de la compétence entre les deux ordres de juridiction, administrative et judiciaire.

Le second moyen de cassation visait la démolition de l’ouvrage ordonnée par la cour d’appel et reprochait à celle-ci de ne pas avoir pris en compte la délibération du syndicat intercommunal autorisant son président à lancer les enquêtes préalables à l’obtention d’une déclaration d’utilité publique : l’Assemblée plénière estime que la juridiction de renvoi a pu retenir que cette seule diligence était insuffisante à constituer l’engagement d’une procédure de régularisation appropriée, laquelle aurait été de nature à faire obstacle à la démolition, en application de la jurisprudence, en matière de voie de fait, du Tribunal des conflits ( T. Conflits, 6 mai 2002, Bull. 2002, Trib. Conf. n°10 ; T. Conflits 21 juin 2010, Bull. 2010, T. conflits, n° 14 précité ) ainsi que de la Cour de cassation ( 3ème Civ. 30 avril 2003, n° 01-14.148 ; Bull. 2003, III, n° 92 ; 1ère Civ. 8 mars 2012, n°11-10.378).

Non rétroactivité de la loi Cour de Cassation

ATTENDU QUE … FAIT GRIEF A L’ARRÊT CONFIRMATIF ATTAQUE (PAU, 31 MAI 1978)D’AVOIR DÉCLARE LA VILLE DE PAU PROPRIÉTAIRE DU LIT DE L’ANCIEN RUISSEAU LE HEDAS, TRANSFORME DEPUIS 1874 EN ÉGOUT COLLECTEUR, DANS SA PARTIE QUI TRAVERSE LE FONDS DE …., ALORS, SELON LE POURVOI, “QUE, D’UNE PART, LES INDICATIONS DE CONFRONTS DANS UN ACTE NE PEUVENT MODIFIER L’ÉTENDUE RÉELLE DES DROITS, QUE DANS DES CONCLUSIONS DEMEURÉES SANS RÉPONSE….. FAISAIT VALOIR QUE LES INDICATIONS DU CAHIER DES CHARGES ENTAIENT ERRONÉES ET EN CONTRADICTION AVEC LES ORIGINES DE PROPRIÉTÉ AINSI QUE LES INDICATIONS FIGURANT A LA CONSERVATION DES hypothèques ET AU CADASTRE”, ET ALORS QUE, D’AUTRE PART, “LES DISPOSITIONS DE LA LOI DU 8 AVRIL 1898 SONT APPLICABLES A TOUTES LES EAUX COURANTES NON NAVIGABLES NI FLOTTABLES, QUE LA PROPRIETE DU LIT DU RUISSEAU RECONNUE PAR CETTE LOI AUX RIVERAINS NE POUVAIT DISPARAITRE PAR L’EFFET DE LA CONVERSION DE CELUI-CI ET SON UTILISATION EN TANT QU’EGOUT” ;

MAIS ATTENDU QUE L’ARTICLE 3 DE LA LOI DU 8 AVRIL 1898, EN DISPOSANT QUE LE LIT DES RIVIÈRES NON NAVIGABLES NI FLOTTABLES APPARTIENT AUX propriétaires DES DEUX RIVES, A CONSACRE UN PRINCIPE NOUVEAU ET N’EST APPLICABLE AUX SITUATIONS ET AUX RAPPORTS JURIDIQUES ÉTABLIS OU FORMES AVANT SA PROMULGATION QU’AUTANT QU’IL N’EN DOIT PAS RÉSULTER LA LÉSION DE DROITS ACQUIS ;

ATTENDU QUE L’ARRÊT CONSTATE QUE LA VILLE DE PAU JUSTIFIE D’UN DROIT ACQUIS, ANTÉRIEUR A LA PROMULGATION DE LA LOI DU 8 AVRIL 1898, A LA PROPRIÉTÉ DU LIT DU…… ; QUE LA COUR D’APPEL, QUI N’ÉTAIT PAS TENUE DE RÉPONDRE A DES CONCLUSIONS QUE SA DÉCISION RENDAIT INOPÉRANTES, ET ABSTRACTION FAITE DU MOTIF SURABONDANT RELATIF AUX CONFRONTS PRÉCISES PAR LE TITRE DE….., A légalement JUSTIFIE SA DÉCISION ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L’ARRÊT RENDU LE 31 MAI 1978 PAR LA COUR D’APPEL DE PAU.

Titrages et résumés : EAUX – Cours d’eau – Cours d’eau ni navigable ni flottable – Lit – Propriété – Loi du 8 avril 1898 – Application dans le temps.
L’article 3 de la loi du 8 avril 1898, qui dispose que le lit des rivières non navigables, ni flottables appartient aux propriétaires des deux rives, a consacré un principe nouveau et n’est applicable aux situations et aux rapports juridiques établis ou formés avant sa promulgation qu’autant qu’il n’en doit pas résulter la lésion des droits acquis.

Voir la théorie de Paul ROUBIER sur le conflit des lois dans le temps

Le principe de non-rétroactivité des normes nouvelles

Le principe de non-rétroactivité vise à encadrer la période de transition entre la loi ancienne et la loi nouvelle.

S’agissant d’actes administratifs, c’est le Conseil d’État qui, dans un arrêt du 25 juin 1948 (Société du journal L’Aurore), a affirmé le principe de non-rétroactivité des règlements.

En matière civile, il est énoncé à l’article 2 du Code civil :

« La loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a point d’effet rétroactif ».

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Cour de Cassation pourvoi: 02-80343 passes à poissons

qu’il convient d’en conclure qu’au regard des constatations opérées et sachant que si l’obligation d’installer un dispositif assurant la libre circulation des poissons migrateurs est une obligation de résultat, la charge de la preuve qu’il y a été manqué en l’espèce incombe à l’accusation, l’infraction n’est pas caractérisée et il convient d’entrer en voie de relaxe ;

La Cour de cassation, gardienne de l’application de la loi dans le temps

Chapitre 1. La Cour de cassation, gardienne de l’application de la loi dans le temps

Lorsque advient une loi nouvelle, se pose inévitablement la question de son application à des situations passées (section 1) et celle de son rapport avec des situations à venir (section 2). La Cour de cassation contribue à éclaircir la manière dont doivent s’articuler loi ancienne et loi nouvelle et à en définir les périmètres respectifs.

Section 1. La loi nouvelle et le passé

La Cour de cassation veille au respect du principe général de non-rétroactivité de la loi nouvelle (§ 1) auquel un certain nombre d’exceptions sont tolérées (§ 2).

§ 1. Le principe de non-rétroactivité de la loi nouvelle

La Cour de cassation applique avec rigueur le principe de non-rétroactivité de la loi nouvelle, tant en matière civile (A) qu’en matière pénale (B).

A. En matière civile

La loi nouvelle ne rétroagit pas sur les situations juridiques qui se sont constituées antérieurement à son entrée en vigueur. Ce principe de non-rétroactivité se manifeste de deux manières. D’un côté, la loi nouvelle ne peut remettre en cause une situation juridique qui a été régulièrement créée et constituée sous l’empire de la loi ancienne dans le respect de celle-ci (1). D’un autre côté, elle ne peut pas, en principe, entraîner la validation d’un acte juridique qui n’avait pas été conclu conformément aux dispositions de la loi ancienne sous l’empire de laquelle il avait été constitué (2).

1. Non-rétroactivité sur les situations antérieurement constituées

Selon la formule consacrée à l’article 2 du code civil, inchangée depuis 1804 et placée en tête du code civil, « la loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a point d’effet rétroactif ».

Non rétroactivité de la loi

Cour européenne des droits de l’homme – 7 mai 2019 – n° 18809/07, n° 21104/06, n° 51103/06

non-rétroactivité qui interdit normalement l’application d’une loi nouvelle à des faits antérieurs à son entrée en vigueur, s’agissant d’une question d’ordre public et conformément à la jurisprudence …non-rétroactivité qui interdit normalement l’application d’une loi nouvelle à des faits antérieurs à son entrée en vigueur, il convenait d’appliquer cette nouvelle modification législative à la procédure…