- L’existence d’un lit naturel à l’origine.
- L’alimentation par une source
- Un débit suffisant une majeure partie de l’année,
- La continuité amont-aval,
- La présence de berges et de substrat différencié,
- La présence de vie aquatique.
Ces différents critères ont été retenus pour leur valeur générale ; leur mise en œuvre implique une adaptation au contexte local. Cette partie présente les modalités d’appréciation des critères jurisprudentiels retenues en région PACA. Celles-ci sont schématisées sous la forme d’un arbre de décision : logigramme d’interprétation des écoulements (format pdf – 72.6 ko – 15/02/2017) .
1. L’existence d’un lit naturel à l’origine
Ce critère doit permettre de mettre en évidence le caractère naturel du
milieu, et de distinguer les cours d’eau, des ouvrages artificiels,
comme les canaux d’irrigation, les canaux d’amenée alimentant les
moulins et usines hydroélectriques et autres infrastructures de
transport d’eau.
La référence à la situation originelle fait que les cours d’eau
fortement anthropisés (tels que les cours d’eau canalisés ou recalibrés)
doivent être considérés comme des cours d’eau, même si leur
modification substantielle a pu leur faire perdre certaines formes de
vie aquatique ou un substrat spécifique.
Les références historiques mobilisables sont :
- Les SCAN 25® « historiques », produits à partir du début du XXè siècle, d’ancienneté variable selon les secteurs
- La carte d’état major, levée entre 1820 et 1880
- La carte de Cassini, levée entre 1759 et 1789
Certains aménagements hydrauliques sont très anciens, pour lesquels
la présence d’un lit naturel à l’origine ne peut être démontrée car
antérieure aux premières cartes historiques. Des critères d’appréciation
complémentaires devront être mobilisés pour caractériser les
écoulements.
Ce critère ne doit pas par ailleurs faire perdre de vue que, en fonction
des usages locaux, des bras artificiels (tels que des biefs) laissés à
l’abandon et en voie de renaturation peuvent être considérés comme des
cours d’eau. Il en va de même si un bras artificiel capte la majeure
partie du débit, au détriment du bras naturel (et remettant en cause le
critère de permanence de l’écoulement dans ce dernier) : le bras
artificiel pourra être considéré comme cours d’eau. Le cas des canaux
d’irrigation est aussi susceptible d’être discuté dès lors que la
période de chaumage (mise à sec) est inférieure à 6 mois. On mobilisera
sur ces tronçons les critères d’appréciation complémentaires. Des lits
artificiels n’ayant pas d’origine naturelle peuvent également être
considérés comme des cours d’eau au titre de la police de l’eau si tel
est l’usage établi, du fait d’autres usages que leur vocation propre
(prélèvements ou rejets), attesté par des décisions de l’administration,
qui n’ont pas été remis en cause.
2. L’alimentation par une source
Ce critère permet de distinguer les cours d’eau, des fossés (ouvrages
artificiels destinés à collecter les eaux de pluie et de ruissellement),
des ravines et autres vallons secs (qui assurent la même fonction tout
en étant naturels).
Cette source n’est pas nécessairement bien localisée. Elle peut être
ponctuelle, à l’endroit où la nappe jaillit (cas typique d’une
résurgence karstique), mais ce peut aussi être un affleurement de nappe
diffus ou l’exutoire d’une zone humide, notamment en tête de bassin.
Comme pour le critère de débit suffisant une majeure partie de l’année,
il ne faut pas oublier que certaines sources peuvent se tarir
momentanément.
La vérification du critère d’alimentation par une source peut s’avérer
compliquée sur le terrain, lorsqu’elle implique de prospecter un
linéaire de cours d’eau important, a fortiori en terrain difficile. La
vérification de ce critère ne sera donc pas toujours possible ; elle
pourra s’appuyer sur des témoignages et sur d’éventuels documents
cartographiques : la BD TOPO et les SCAN 25 de l’IGN figurent un certain
nombre de sources, sans que cette information puisse être considérée
comme exhaustive.
3. Un débit suffisant une majeure partie de l’année
Ce critère, complémentaire du critère d’existence d’une source, doit
permettre de distinguer les cours d’eau, des fossés (ouvrages
artificiels destinés à collecter les eaux de pluie et de ruissellement),
des ravines et autres vallons secs (qui assurent la même fonction tous
en étant naturels), sachant que le vallon sec est aussi à distinguer des
cours d’eau temporaires existants en zone méditerranéenne.
Le caractère suffisant ne saurait être rattaché à une valeur minimale de
débit, du fait de la multitude des situations possibles (fonction de la
pluviométrie, du relief, du couvert végétal, de la pédologie, de la
géologie, de l’humidité du sol,…).
On note cependant qu’en région PACA, certains cours d’eau ont des
écoulements naturellement intermittents, du fait de la géologie (qui
peut générer des pertes importantes par infiltration dans le lit du
cours d’eau) mais surtout de la climatologie naturellement contrastée,
induisant des étiages prononcés et des assecs qui peuvent être longs
(estivaux ou hivernaux) ; les espèces qui y vivent sont adaptées à ces
conditions : on parle de cours d’eau temporaires méditerranéens. Les
critères complémentaires seront systématiquement mobilisés. La présence
de marques récentes attestant d’un certain transport solide (suffisant)
donc d’écoulements d’une certaine énergie (éléments roulés grossiers à
gros) revêt dans ces milieux un caractère déterminant, en confirmant
l’existence d’un débit suffisant, une partie de l’année (sur les cours
d’eau temporaires méditerranéens, la notion de débit suffisant est à
considérer sur une période plus longue qu’une année), de même que la
présence de végétation et de macroinvertébrés.
L’absence d’écoulement de débit suffisant une majeure partie de l’année
ne saurait donc être uniquement appréciée sur la base de l’observation
in situ, d’autant plus si celle-ci est ponctuelle et a fortiori si elle
est réalisée dans une période de l’année inappropriée ; la réponse de
l’administration intégrera si besoin des considérants de géologie, de
climatologie et de pression anthropique, pour le cas échéant, identifier
un cours d’eau en l’absence d’écoulement constaté in situ.
4. Les critères complémentaires
◘ 4.1. La continuité amont aval
Un cours d’eau est aussi caractérisé par sa continuité, d’amont en
aval : continuité hydrologique (de l’écoulement), mais aussi
morphologique et biologique. La caractérisation de l’écoulement doit
être faite sur un linéaire suffisant ou sur un nombre de points
d’observation suffisant pour être représentative du tronçon de cours
d’eau dans lequel cet écoulement se trouve.
◘ 4.2. La présence de berges et de substrat différencié
Le lit d’un cours d’eau se caractérise aussi par la présence de berges
et d’un substrat spécifique. En effet, le passage répétitif et
privilégié de l’eau avec un débit suffisant et une majeure partie de
l’année (une des 3 caractéristiques principales retenues pour identifier
un cours d’eau) génère des phénomènes d’érosion, de transport
(transport de matières en suspension, charriage des matériaux plus
grossiers tels que sables et graviers), et de dépôt, laissant des traces
visibles. On recherchera donc :
- La présence d’un lit marqué par rapport au terrain naturel environnant
- Un substrat de fond du lit différencié des terrains adjacents, que ce soit par sa granulométrie, son arrangement stratigraphique (alternance de lits de sables et autres matériaux roulés avec des lits de matières fines et organiques attestant de phénomènes de transport et de dépôt) ou sa couleur.
◘ 4.3. Présence de vie aquatique
Lorsque l’écoulement est présent une majeure partie de l’année et
suffisant, il permet le développement d’organismes spécifiques,
caractéristiques de milieux aquatiques. Des communautés floristiques et
faunistiques typiques sont donc régulièrement présentes dans ou aux
abords des ruisseaux.
L’absence de vie aquatique macroscopique visible ne permet pas de
conclure qu’il ne s’agit pas d’un cours d’eau. Cette absence peut
résulter de facteurs naturels contraignants (milieux d’altitude, cours
d’eau temporaire) ou de facteurs anthropiques (pollution, travaux de
curage-recalibrage passés).
◘ 4.4. Notion de risque
Des écoulements importants et dangereux peuvent avoir lieu, lors
d’épisodes pluvieux intenses et/ou dans des bassins versant avec de
fortes pentes, dans des vallons secs ne présentant pas d’écoulement la
majeure partie de l’année, ni de source. Ces écoulements peuvent
cependant :
- Générer des débordements dans les zones aval.
- Participer au charriage de matériaux solides, susceptible en zone de montagne d’induire des débordements localisés et par ailleurs nécessaire au bon fonctionnement des écosystèmes aquatiques des cours d’eau (les matériaux présents au fond du lit constituent l’habitat de la plupart des espèces aquatiques) et participant à leur équilibre hydrosédimentaire (un déséquilibre sédimentaire se manifeste par l’incision du lit, la chute des berges, la baisse du niveau des nappes, des dégâts sur les infrastructures jouxtant la rivière et sur les ouvrages d’art…). Le fort transport solide des rivières alpines est à l’origine des rivières remarquables que sont les rivières en tresse.
- Contribuer à la pollution des cours d’eau et sur le littoral, à la pollution des eaux côtières. En autres polluants mobilisés et transportés par les eaux de ruissellement, les macrodéchets sont souvent nombreux, en milieu urbain et périurbain notamment, dans ces vallons oubliés, parfois assimilés à des zones de décharge.
Certaines ravines et vallons secs ne sont pas identités comme cours
d’eau au sens de la jurisprudence. Ils sont alors à distinguer des cours
d’eau temporaires présents en zone méditerranéenne. Les enjeux
hydraulique et sédimentaire existant en région PACA font que ces vallons
secs pourront cependant être intégrés à la cartographie lorsque les
enjeux le justifient, c’est à dire notamment lorsqu’ils sont
susceptibles de générer des débits ruisselés importants et/ou un certain
transport solide. Ils sont alors affichés distinctement.
La présence d’ouvrages de protection même anciens aux abords du cours
d’au est un indice généralement parlant, de même que des marques de
transport solide pouvant attester d’un écoulement de forte énergie. La
surface du bassin versant intercepté est un autre élément clé
d’appréciation, même s’il n’est pas possible de définir un seuil de
surface (toujours du fait des nombreux facteurs influençant le régime
des eaux). Le dire d’expert pourra être également invoqué, de même que
la connaissance empirique et historique des évènements passés.